L’IA va dans les prochaines années jouer un rôle toujours plus important dans la santé, pour la recherche de nouveaux médicaments, la personnalisation des traitements, l’aide au diagnostic… Mais on le sait, l’IA n’est pas parfaite ! La lutte contre les biais est par exemple indispensable, mais d’autres combats vont devoir être menés : transparence, explicabilité, accessibilité, équité…
En 2022, la Délégation au numérique en santé a publié une série de recommandations de bonnes pratiques pour une éthique « by design » des solutions d’IA.
Parmi ces bonnes pratiques, elle recommande de déployer des systèmes qui s’engagent « dans une démarche de sobriété numérique » et intègrent « des règles de réduction de l’empreinte environnementale ». La Délégation a établi une liste de critères permettant d’évaluer le caractère éthique d’une IA et notamment le respect de l’environnement :
- Avez-vous mis en place des mécanismes pour mesurer l’impact environnemental de la mise au point, du déploiement et de l’utilisation du système d’IA (par exemple, énergie consommée par les centres de données, type d’énergie consommée par les centres de données, etc.) ?
- Avez-vous prévu des mesures pour réduire l’impact environnemental du cycle de vie de votre système d’IA ?
L’utilisation d’une intelligence artificielle nécessite souvent une grande puissance de calcul. En adoptant des bonnes pratiques de conception, tant au niveau de l’infrastructure que de l’IA elle-même, il est possible de réduire de manière importante l’empreinte environnementale des algorithmes, et dans le même temps, les coûts de fonctionnement.
Étape 1 : construire une infrastructure puissante ET économe
- Bien choisir le socle matériel
La première étape pour concevoir une IA économe en énergie est d’opter pour des équipements eux-mêmes économes en énergie. Les CPU et GPU de dernière génération, composants essentiels pour ce type de traitement, peuvent consommer d’importantes quantités d’énergie si leur exploitation n’est pas optimale. L’intégration d’accélérateurs spécifiquement dédiés à l’IA peut permettre de réduire la consommation en évitant de faire porter l’ensemble de la charge de travail sur le seul couple CPU/GPU.
L’intégration d’accélérateurs spécifiquement dédiés à l’IA évite de faire porter l’ensemble de la charge sur le seul couple CPU/GPU.
- Gérer la performance…
Les équipements informatiques modernes sont équipés de mécanismes de gestion de la puissance qui permettent de réguler la consommation d’énergie. L’IA être utilisée pour surveiller ces systèmes et optimiser leur utilisation. Par exemple, l’IA peut déterminer quand il est approprié de réduire la vitesse du processeur ou de mettre en veille certains composants pour économiser de l’énergie.
- … et la température
Une bonne gestion de la chaleur est essentielle à une plus grande sobriété énergétique. L’IA peut être utilisée pour surveiller la température des composants et ajuster le refroidissement en conséquence, pour éviter à la fois la surchauffe et le gaspillage d’énergie.
Étape 2 : concevoir des modèles efficients
- Opter pour les algorithmes les plus sobres
Le choix des algorithmes joue un rôle essentiel dans l’efficacité énergétique de l’IA. Il est crucial de sélectionner ceux qui offrent la consommation de ressources de calcul la plus faible par rapport aux performances souhaitées. L’optimisation des algorithmes va réduire la durée des calculs, et donc la quantité d’énergie consommée.
- Adapter la collecte à la finalité
La Délégation au numérique en santé conseille aux utilisateurs de s’interroger sur la finalité de leur IA et d’adapter la collecte de données en fonction. « Il peut être judicieux d’évaluer au préalable le volume de données nécessaires à un apprentissage robuste afin d’adopter une certaine « sobriété numérique » et ainsi diminuer l’impact environnemental du numérique », indique-telle, tout en rappelant le fait que « le principe de proportionnalité des données par rapport à la finalité du traitement » est une exigence du RGPD
La conversion de modèles de 32 bits en modèles de 8 bits peut réduire la consommation d’énergie sans impact significatif sur les performances.
- Quantification et réduction du modèle
La quantification de modèle peut permettre de réduire la précision des paramètres d’un modèle d’IA tout en préservant ses performances, diminuant la taille du modèle et la quantité de calcul nécessaire pour l’exécution. Par exemple, la conversion de modèles de 32 bits en modèles de 8 bits permet de réduire considérablement la consommation d’énergie sans impact significatif sur les performances. Concevoir des modèles plus petits et plus légers peut aussi entraîner une utilisation plus économe en énergie.
Étape 3 : consommer une énergie durable
- Penser renouvelable
Lorsque cela est possible, l’infrastructure peut être alimentée à partir d’une source d’énergie renouvelable, telle que l’énergie solaire ou éolienne. Les systèmes d’IA peuvent être configurés pour fonctionner lorsque ce type d’énergie est disponible, et à l’inverse, se mettre en veille lorsque ce n’est pas le cas.
La conception d’une IA écoresponsable « by design » repose sur une combinaison de choix matériels et d’optimisation des algorithmes. Et pour pousser un peu plus loin la stratégie, il est également important de penser à l’impact « post traitement ». La Délégation ministérielle souligne qu’il est « souhaitable de mettre en œuvre des mécanismes de destruction automatique des données pour éviter de conserver des données au-delà des besoins de la recherche dans le cadre de laquelle elles ont été recueillies et utilisées ». Cela permettra d’une part de garantir que ces données ne seront pas exploitées à d’autres fins que celles initialement prévues, mais également de diminuer la consommation des systèmes de stockage.